Le poème du zoo (Les ateliers de Suzanne Doppelt)
Le poème du zoo
Chaque atelier commence par une petite promenade dans un lieu précis du zoo, cette fois-ci entre l’enclos des baudets du Poitou et celui des tortues. Il s’agit de fabriquer un court poème mental et de le retranscrire aussitôt revenu dans la salle.
Promenade du jour entre les baudets du Poitou et les tortues absentes.
Taglio.
Quand il brait, on croirait cet homme fou qui s’épanche sur le quai du métro.
Fou ou malheureux.
Qui sait.
Heureux, lui, Taglio.
La mascotte des enfants
Qui sent si fort
Qui plaît tellement.
Ils lui caressent son poil brun et touffu
Là entre les deux yeux.
Si doux, si épais.
Semble muer par endroit en plaques laineuses.
Le matin distribue le courrier.
Messager de la simplicité et de l’essentiel.
La vie quoi.
L’homme sur le quai devrait venir lui caresser la truffe.
l’âne
regard doré fixé au loin
frémissement de la paupière
soupir
comme un regret de friches dorés du champ moissonné
toujours l’âne préféra la paille à l’or
petit poème en friche
friches des formes
désordre de la friche
coquelicots orties herbes pissenlits
variations frémissements sonores
les tortues ont fui le bruit
les tortues ont fui le froid ...
dans l’allée lumineuse
deux ânes séparés se regardent
sans tortues à l’horizon
une ombre se détache
L’âne du Poitou
porte tout son poids tout,
sur la pointe de ses pattes
en équilibre stable
chevelure de rasta
poils longs
Il braie ...
Les tortues se cachent .
Sabots joints, oreilles dressées
de son nez il tâte le vent
et s’émouche de la queue.
Le petit âne marron médite.
Dans ses yeux obliques,
il esquisse un sourire.
Est-ce déjà l’automne ?
Les feuilles sont tombées
sur les dos ocellés des tortues indécises.
Premières images de ce matin de Juin.
Garde-corps
Interdit de franchir le garde-corps
le garde-corps avec ses poils
noirs
le vent et l’âne crient tous deux en même temps.
Saut d’une bête,
bête que je suis devant le garde-corps
interdit.
Interdit d’être une bête ?
L’animal que j’abrite garde mon corps
noir
et les poils sous mes doigts sont peut-être les miens.
Qui sait ?
Sous l’air et le dimanche, les voici qui se hérissent.
Toutes les tortues en leur absence
en savent davantage
que moi.
poème poitou seychelles
va petit âne
le prédateur c’est l’homme
attention à la morsure des poubelles
les tortues sont à l’intérieur