))) JE PENSE À TOI (((

))) JE PENSE À TOI (((





Une proposition de Frank Smith




D’octobre 2012 à juillet 2013, au Domaine de Chamarande (Essonne) et dans le cadre du programme régional de résidences en Île-de-France, Frank Smith initie une recherche portant sur la question : Qu’est-ce que ça veut dire, « penser à quelqu’un » ?



La pensée à quelqu’un est-elle une pensée comme les autres ? Serait-elle vide, comme le prétendait Roland Barthes ?

Comment distinguer la pensée à quelqu’un de la pensée à quelque chose ou de la pensée en général ? La pensée à quelqu’un ne nous révèle-t-elle pas non seulement « la structure de notre pensée mais la structure de notre être en général, le sens même, l’essence même de notre vie » (Frédéric Worms) ?

Cette question veut servir de point de départ à une dérive poético-théorique qui tentera, entre littérature, philosophie et esthétique, de dégager les effets et les implications de certaines situations de pensée à l’autre, la présentation et l’appréhension de ce vécu ordinaire...

Ce serait le mérite d’une telle expertise que de nous pousser vers les limites où l’art et la vie interagissent, n’interagissent pas, se heurtant au mur du signifiant ou à l’impossibilité à exprimer le réel.



…¢ Cette enquête parcourt concrètement plusieurs champs d’investigations :


- une fouille au cœur des Archives départementales de l’Essonne dans un fonds de 10.000 cartes postales ; l’envoi et la réception de cartes postales (« Une seule adresse, X destinataires ») portant la mention « Je pense à toi », en hommage à l’artiste japonais On Kawara ;

- un appel à la production de documents inédits (textes, sons, images, etc.) auprès d’artistes, d’écrivains et de théoriciens permettant, selon leur perception personnelle, de traduire ou de rendre compte des états polymorphes de cette « pensée à l’autre » ;

- la production d’une pièce sonore, en collaboration avec le collectif Soundwalk, conçue à partir des environnements sonores actifs au sein du Domaine de Chamarande ;

- la réalisation d’un « film des visages & des pensées » élaboré à partir d’un recueil d’« empreintes vidéo » où les visiteurs du Domaine seront invités à penser à quelqu’un en temps réel ;

- une série d’événements publics ;

- un atelier d’écriture.



…¢…¢ Les fruits de cette recherche, pour tenter de mettre à jour les possibilités d’attachements immatériels entre les êtres au sein d’une société désenchantée et en déroute, irrigueront plusieurs plate-formes de création :


- l’érection dans le cadre de l’exposition « Milieux » (été 2013) d’une cabane ou « Musée des pensées », en hommage à l’artiste allemand Ekkehard Alteburger ; la dispersion au sein du Domaine de « cahiers ouverts au vent » rassemblant des notes comme autant de pensées à l’autre, en référence au ready-made malheureux de Marcel Duchamp ; la création d’un « arbre des pensées », en hommage à Yoko Ono ;

- la publication d’une revue papier sous le titre Je pense à toi. Le journal des pensées, l’autre, à paraître au printemps 2013 puis disponible sur internet ;

- un texte inédit intitulé Qui [m’]accompagne.



…¢…¢…¢ Qu’est-ce que ça veut dire, « penser à quelqu’un » ?

D’abord, on doit poser la question de la manière la plus forte possible sans essayer d’y apporter une réponse définitive, parce qu’il n’y en a pas, mais en amorçant une réponse en transit, en stand-by, in between. Essayer de s’approcher au maximum de la complexité d’une situation de « pensée à l’autre » et de laisser ouverte l’interprétation afin que le document produit pour l’occasion ne se termine pas en dehors mais dans la tête, le cœur …“ le mot est lâché …“ ou le ventre.

Par cette enquête à choix multiples, des textes, des films, des images, des schémas et maquettes, des compositions sonores seront ainsi rassemblés pour rendre compte des explorations diverses que suscite la pensée à l’autre.


Il ne s’agirait donc pas de trouver la réponse, mais de s’en approcher, entre le pouvoir des mots et des images, et leur impossibilité. Articuler, souligner une réponse. L’intensifier. « Lui donner de l’air et du geste. » (Georges Didi Huberman)



19 décembre 2012
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