Les philosophes et les enfants

Un avion entre Paris et Kinshasa le mardi 16 décembre, un avion de retour entre Kinshasa et Paris le lundi 22 décembre, c’est le ciel et l’aller-retour entre la France et l’Afrique pour un colloque intitulé « La culture du dialogue, les frontières et l’accueil de l’étranger ».

Trois philosophes doivent s’envoler, l’un reste à terre, le temps d’une rétention, le temps d’une garde à vue. Deux philosophes au retour s’envolent, l’atterrissage à Paris-Charles-de-Gaulle les mène vers une rétention, le temps d’une autre garde à vue.

Socrate, qui a bu la cigüe, a vécu sa mort, Hélène Cixous nous l’a rappelé jeudi 18 décembre au centre Cerise. Il n’en est pas temps pour eux : celui des trois philosophes qui ne prit pas son envol mène des recherches sur l’émancipation aujourd’hui, l’un des deux philosophes qui s’envola et fut conduit en garde à vue met en avant le rire philosophique.

Je connais aussi des enfants placés en garde à vue : dans une cellule proche des deux leurs, un Africain attendait d’être reconduit à la frontière. À celui-ci, comme à ceux que les philosophes croisent dans un avion, nous avons dit : Il me sera difficile de venir te voir.

Les philosophes et les enfants, privés du ciel, à la lumière artificielle du néon de leurs cellules, partagent la même colère.


Dans la rubrique Rebonds de Libération, lire Les philosophes, les sans-papiers et l’aéronef, par Sophie Foch-Rémusat, Yves Cusset, Pierre Lauret, philosophes.

Les trois philosophes ont désormais un comité de soutien.

23 décembre 2008
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