Assia Djebar à l’Académie française

On se demande un peu ce qui lui a pris, à Assia, d’aller siéger entre Rinaldi et Robbe-Grillet... Pour consoler Florence Delay et qu’elle s’y sente moins seule ?

En tout cas, elle y est, et on se demande bien comment elle, la remuante, la causeuse des causeuses, elle pourra s’assagir suffisamment pour tenir toute une séance.

Il y a trois ans, nous mettions en ligne, Ronald Klapka et moi-même, le discours qu’Assia Djebar avait prononcé lors de la remise du prix des libraires en Allemagne : Idiomes de l’exil et langue de l’irréductibilité.

Il n’y a pas de jour depuis lors que sur remue.net ce texte n’ait été téléchargé entre 30 et 40 fois... Et au moins une fois par mois, depuis trois ans, un message d’un étudiant ou d’une étudiante, souvent de l’autre côté de la Méditerranée, que nous lui faisions parvenir. C’est notre académie à nous, sans uniforme.

En prime, ci-dessus, une image qui annonce ce qu’il va en être pour les 40 : il y a un an, avec 80 personnes pour les écouter à la Maison des Ecrivains, on avait été quelques auteurs à lui rendre hommage, dont Pierre Michon, Malek Alloula, Albert Memmi, Michelle Perrot, Jacqueline Risset, Wolfgang Asholt et moi-même... Et ce moment magique (une bonne demi-heure, en fait, mais quel voyage !), Assia et Andrée Chédid parlant simultanément et ayant même oublié l’organisatrice, Mireille Calle-Gruber : est-ce que chacune écoutait encore l’autre ? Peut-être que la Méditerranée permet qu’on écoute en parlant, parle en écoutant, puisque chaque nouvelle boucle de parole, chaque témoignage ou souvenir ou portrait qu’elles enchaînaient était en réponse à ce que l’autre venait d’offrir : et pour nous, en stéréo, c’était comme courir et courir, mais quelles voix, et quels ciels...

Au fait, Andrée Chédid peut-être qu’elle aurait elle aussi droit à l’Immortalité et qu’elle serait elle aussi capable de les secouer un peu, nos endormeurs de dictionnaire ?

18 juin 2005
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