Perplexe

Perplexe devant la difficulté à attirer, donner envie, attraper, éveiller les jeunes du FJT.
Perplexe, démunie, déçue.

On prépare l’atelier autour de photos, livres, thèmes, jeux ou impros, on arrive, rien ne se passe ou plutôt personne ne vient, on repart. Au fond du sac les feuilles blanches et des impressions grises.

Les parcours sont pour certains si accidentés que c’est délicat de leur en vouloir. Mais quand on est là justement pour eux, les aider, les écouter, les comprendre, en effaçant les barrières du « savoir », du moins en apparence, les mauvais jugements et les a priori (combien de fois j’ai entendu : je ne suis pas assez intelligent pour ça, l’écriture), quand on s’acharne et que certains soirs personne n’est là, on tangue entre l’impuissance, la colère et un sentiment de gâchis. On aimerait les secouer et leur dire d’arrêter parfois de se complaire, de faire les éternelles victimes, d’arrêter de chercher un prix, une valeur à tout, d’arrêter leurs casques sur les oreilles pendant qu’on leur parle, d’arrêter de mettre des étiquettes partout et d’avoir toujours un bon prétexte pour ne pas venir à l’atelier (la seule flemme souvent de descendre les étages de leur chambre au foyer…). Et ce que je ressens n’est rien comparé à l’engagement et au travail des intervenants sociaux.

Je vais laisser tomber le livre magnifique d’Olivia Rosenthal, On n’est pas là pour disparaître que je voulais faire découvrir, du moins quelques chapitres, en partant du titre et en jouant autour des exercices, extrait :

« Faites un exercice.
Pensez à tout ce pour quoi vous pourriez dire, sans aucune erreur possible, que jamais vous ne ferez.
Jamais je ne sauterai en parachute
Jamais je n’achèterai une arme à feu
Jamais je ne me jetterai sous le métro
Jamais je n’aurai d’enfant. »

Je vais arrêter de préparer l’atelier, ça ne se passe jamais comme prévu et j’ai déjà d’avance un sac rempli à ras bord d’idées, pistes, notes, questions, extraits, photos…
Il faut trouver d’autres moyens de faire passer les mots, de rassembler autour d’une feuille ou alors patienter d’une autre façon… c’est aussi l’enjeu d’un tel projet : savoir s’adapter, savoir être déçu, et puis
rebondir.
L’envie et la conviction ne me quittent pas. Il y a déjà eu de très beaux moments. Et d’ailleurs il suffit que j’écrive cet article pour qu’un mardi soir un jeune vienne avec un texte inspiré de l’exercice ci-dessus. Jamais à l’abri de surprise avec eux. Et l’air de rien ils jettent souvent un œil à ce qui se passe sur ce site.
À mardi…

29 septembre 2011
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