Le haricot sauteur : à propos d’Enis Batur, par Pascal Gibourg

Enis Batur aux éditions Actes Sud.

Pascal Gibourg sur remue.net.


 

« La pomme d’Adam, c’est désormais le centre de gravité du corps. »
Enis Batur, La Pomme.




             Pour quelqu’un qui se dit volontiers habité par le nomadisme, la notion d’origine est forcément sujette, sinon à caution, du moins à récits. Enis Batur est un écrivain turc né au début des années cinquante. Il a étudié en Turquie et en France, pays auquel il reste attaché physiquement et spirituellement. En effet, la culture française de Courbet à Deleuze en passant par Godard ou Sophie Calle ne semble pas avoir de secrets pour cet auteur prolixe et érudit dont l’œuvre avoisine la centaine de titres. Mais au-delà de cette polarité, c’est la culture européenne qui infuse ses livres et par-delà toute approche géographique c’est un quelque chose qui transcende les lieux pour hanter l’écriture : le moteur d’une quête, la présence d’une voix, la trouvaille d’une trace, le fantôme d’une expérience. Une petite dizaine de titres seulement sont traduits en français, parmi lesquels on trouve des essais ou ce qu’il nomme lui-même des « tentatives de romans », ainsi que des poèmes. C’est à l’essayiste plus qu’au poète que je voudrais m’intéresser ici, et plus particulièrement à la trilogie publiée chez Actes Sud : Amer savoir, La Pomme, D’autres chemins.
             Même si un effet de mode a pu jouer en faveur du phénomène, on trouve encore rarement des livres de littérature faisant la part belle aux images. Rarement l’écriture est intrinsèquement liée au visible et rarement les écrivains revendiquent comme nécessaire la présence d’images au sein de leurs livres. Une représentation peut être au départ d’une écriture mais elle reste généralement hors champ, commencement extrinsèque de l’œuvre dont il ne sera pas même fait cas. André Breton, avec Nadja, fut sans doute un des premiers à user de la photographie comme d’un moyen pour ancrer le récit dans une réalité indubitable. Plus proche de nous il y a Sebald, dont la littérature procède d’une volonté de lutter contre un refoulement de la mémoire et pour qui les images sont des preuves, suffisantes ou non, qu’un fait ou quelqu’un ont existé. Comme si dire ne suffisait pas et qu’il fallait montrer, l’horreur du nazisme - pour ce qui le concerne - ayant souligné les limites voire l’insuffisance d’une littérature de texte.
             Avec Batur - lequel égrène ou ponctue ses récits de petites photos noir et blanc représentant des lieux, des monuments, des personnes, des objets ou encore des œuvres d’art -, nous n’avons pas affaire à une littérature du traumatisme ou du refoulement mais plutôt à une littérature de l’errance et de l’exploration où les lieux traversés, évoqués, sont pour ainsi dire sommés de restituer les histoires dont ils sont chargés, les pierres écrites, porteuses de sens comme de récits. Sans doute que, chez lui aussi, la perte ou la disparition jouent un rôle, mais elles ne semblent pas conditionner le mouvement, le déplacement, le voyage. Une curiosité, un intérêt qui tendent à rapprocher l’écrivain de l’historien priment sur un fond de détresse ou de perdition. C’est ainsi qu’au fil de ses voyages, il se rend volontiers sur tel ou tel lieu qu’il saura avoir été habité par un écrivain, que ce soit Char ou Sade, Hölderlin ou Pessoa. Et même si l’intranquillité se fait parfois sentir et s’il se décide à l’évoquer, il fera en sorte qu’elle soit à l’origine d’une expérience poétique dont le lecteur tirera bénéfice. C’est ainsi que dans Amer savoir, un des doubles de l’auteur, Elviro Guarçez, quitte nocturnement sa pension lisboète pour se diriger vers le port en quête d’un café qui serait tout à fait quelconque s’il ne se révélait être le lieu de rendez-vous des vrais amateurs de fado, loin des touristes et très près de l’essence même d’une beauté que le personnage recherche inconsciemment. Des musiciens jouent pendant qu’il s’enivre, jusqu’à ce qu’une femme, légende vivante dont le corps est comparé à un poulet, paraisse :

Aigre et passablement enrouée, la voix d’Argentina était à proprement parler une voix implacable, à même de se déplacer à volonté avec une souplesse inouïe sur les marches d’un escalier tout étroit et très raide. Les herbes prirent feu à cet instant précis ; un vent venu d’on ne sait où souffla sur les flammes qui se répandirent rapidement. Elviro Guarçez les entendait craquer : c’était une langue dépourvue de grammaire, de dictionnaire, sans règles ni propriétés, une langue dure, dépouillée et pourtant insaisissable ; d’un tel tissu de paroles et de sons, nul n’imaginerait être le destinataire. Et ce monologue insondable, entré par son oreille, pénétra et envahit toutes les cellules de son corps.

             Ce qui est vrai pour tout auteur, à savoir que toute expérience réelle est aussi esthétique, l’est doublement pour Batur, en ceci que l’écriture de ses essais ou tentatives de romans participe à la fois du récit de soi ou d’un « autre » très proche, un double, et d’une méditation sur l’écriture, sur ce que l’auteur est en train de construire ou sur ce qu’il se promet d’aborder bientôt. Le livre se réfléchit à l’intérieur de la forme qu’il élabore, forme mosaïque où les bribes de récit se succèdent, se mêlent, s’enchâssent, où auteur, narrateur et personnages s’échangent leurs masques pour produire un complexe de résonances, où les effets de rupture sont parfois tels qu’on ne sait plus si l’on est entré dans un nouveau chapitre ou dans un nouveau livre niché dans le livre. Cette incertitude, ce déplacement à la fois ludique et inquiet, cette quête - car il y a quelque chose de l’ordre de l’heuristique dans la démarche de Batur - participent du plaisir qu’on éprouve à le lire, proche de celui éprouvé par le voyageur qui erre de rue en rue, de quartier en quartier sans trop savoir où se situent les frontières, les lignes de démarcation, les panneaux indicateurs censés le conduire à son but. En ce qui concerne Amer savoir, livre composé d’une douzaine de chapitre eux-mêmes subdivisés, Enis Batur dit s’être inspiré de la structure de L’Art de la fugue de Bach, ce qui laissera songeur le lecteur qui aura cru voir relâchement, caprice et liberté là où régnaient structure et contrainte. Cependant l’effet de liberté domine, fût-il conquis au sein de la contrainte ; et la conviction d’être au contact d’un ouvrage conçu sur un mode original et non reproductible s’impose. Bien moins philosophique que le Gai savoir de Nietzsche auquel il adresse tout de même un clin d’œil, ce livre mêle subtilement récit et réflexion, si bien qu’au travers du terme de « tentative » présent dans son sous-titre (Une tentative de roman sur l’art de la fugue) on retrouve celui d’ « essai », l’auteur indiquant implicitement d’emblée que son projet tend aussi bien à brouiller les frontières qui séparent les pays et les temporalités que celles qui permettent de distinguer les genres littéraires.

             Considérer la littérature de Batur comme une littérature de voyage aurait quelque chose de réducteur, à moins de concevoir la lecture, l’écriture, la contemplation ou l’observation attentive d’un phénomène ou d’un être vivant comme un voyage. Mallarmé désignait avec un certain mépris l’écriture qui se subordonne aux faits et qui s’attribue pour mission de les décrire. Il appelait cela « parole de reportage » et lui opposait l’acte poétique. Batur est poète et en tant que tel l’acte d’écriture le requiert, le questionne. Il ne cesse de le réfléchir et de le renouveler. Cependant, antérieure aux histoires, aux récits, Batur postule l’existence d’une expérience. Cette expérience ne se réduit pas à ce qu’on pourrait en voir de l’extérieur, elle implique un cheminement et une compréhension intérieurs.

Voici comment je vois les choses : l’expérience est un événement intérieur, non le résultat d’un événement extérieur. Un seul et même fait peut nourrir mille expériences. Peut-être n’existe-t-il pas d’autre moyen, pour communiquer une expérience, que de raconter des événements extérieurs, donc d’imaginer des histoires. Comme si l’expérience était le fruit de ces histoires. Je pense que le contraire est vrai. Le fruit, ce sont les histoires. L’expérience veut se rendre déchiffrable, elle trouve un cadre où s’insérer. Et c’est pourquoi elle se situe de préférence dans le passé : il était une fois. Un événement qui nous obsède parce qu’il a le pouvoir d’exprimer notre expérience n’a pas besoin d’avoir eu lieu, mais pour que les autres gens comprennent et croient notre expérience, pour que nous nous croyions nous-mêmes, nous faisons comme s’il s’était réellement passé. Tout le monde agit ainsi, et pas seulement les écrivains.

             L’expérience n’est pas de l’ordre du fait, elle est de l’ordre de l’invention et de la croyance. À travers une situation nous imaginons quelque chose qui nous affecte, et si l’on parle d’expérience, qui nous affecte en profondeur. Ce qu’on imagine à ce moment-là peut être confus et demander à être explicité - rôle de l’histoire, du récit. L’évocation d’un événement non vécu peut même éclairer ce récit embryonnaire que l’on porte en soi, ce condensé d’affects et de percepts. Et quand Batur ajoute, « chaque homme s’invente une histoire qu’ensuite il prend pour sa vie, souvent au prix de lourds sacrifices », il est difficile de ne pas penser à la notion de scène primitive telle que la psychanalyse l’a travaillée. Une expérience, plus fantasmatique que réelle, plus imaginée que vécue, conditionne notre vision du monde. Ce n’est pas à proprement parler un récit mais plus exactement la matrice d’un ou plusieurs récits à venir, comme peut-être aussi d’une série de comportements, de décisions. C’est-à-dire que nous croyons en la réalité de quelque chose qui s’est passé, qui a valeur d’expérience fondatrice ou originaire, vers quoi nous tendrions comme vers un but et que l’écrivain tout particulièrement, à travers ces récits, chercherait à rejoindre comme on rejoint un but ou un commencement. Que cette expérience soit évoquée par Enis Batur de manière excessivement abstraite s’accorde somme toute assez bien avec son profil d’écrivain errant en quête d’il ne sait quoi. Car c’est bien lui qui écrit au terme d’Amer savoir : « Il est temps de rentrer - or il n’y a nulle part où je puisse aller. »
             Le lieu, l’endroit. Voilà ce qui fait question. Un lieu n’est pas un lieu s’il ne s’ouvre pas à lui-même comme à son origine, à ce qui fait qu’il soit lieu, qu’il devienne lieu, c’est-à-dire espace habitable, pour le corps et la pensée, pour le regard. Eu égard à ce que j’ai dit de l’intérêt de Batur pour la culture européenne et de son questionnement sur l’être-là, on ne s’étonnera pas - et encore est-ce là une manière de parler - de ce qui fait le cœur de son livre qui s’appelle La Pomme, à savoir l’étude du fameux tableau de Courbet révélé au public plus d’un siècle après sa réalisation, L’Origine du monde. Que son commanditaire fût l’ambassadeur de l’Empire ottoman, Khalil Bey, ne pouvait que rajouter à la curiosité de l’écrivain-chercheur et favoriser la projection, mais là n’est pas l’essentiel.
             La curiosité pour les choses sexuelles n’a pas d’âge et, comme le disait Jean-Claude Milner, le coït est l’horizon de tout rapport, de toute relation, on pourrait dire de tout voyage. Cependant, ce que Batur voit dans L’Origine du monde ce n’est pas tant une figure du désir ou la représentation du corps d’une femme que l’on rêverait de posséder que ce qu’il nomme un endroit. Le scandale vient de là, de ce que le peintre nous frustre du visage pour présenter un corps qui n’appartient à personne. « Cet endroit est à tous - à chacun de nous. C’est l’endroit où commence le monde, notre vie. Nous venons de là. Le grand combat se poursuit le temps de l’atteindre. » Il ajoute, au sujet du vagin qui est le sujet du tableau : « S’il avait eu un visage, c’est de là qu’il nous regarderait. Mais il nous regarde d’ici. »
             Qu’un grand écrivain doublé d’un grand voyageur se saisisse de ce tableau pour à la fois prolonger sa quête et en interroger le sens caché ou premier a quelque chose qui confine à l’évidence voire au comique. Le sexe de la femme pourrait être un symbole, mais de quoi ? D’une version métaphysique de l’existence ?
             Il n’a pas échappé à Batur que c’est sa fonction religieuse qui a autorisé l’art pictural à s’emparer de la grande question de la représentation de la nudité des êtres humains. Il a à ce sujet une remarque qui vaut d’être mentionnée, a fortiori si l’on rappelle la présence des images dans ses livres et le rôle qu’elles peuvent jouer : « C’est en regardant les images que je féconde les questions que je dégage des écrits. » Il évoque ici les textes sacrés, la Bible pour être clair, et les générations de peintres qui ont traité de la question du péché originel et de la Chute du paradis. Mais ne peut-on pas généraliser son propos et voir dans l’usage qu’il fait des images, des photos, non seulement un moyen d’illustrer un propos mais encore une méthode destinée à féconder son écriture, sa réflexion, et pourquoi pas à produire de l’expérience, quitte à contredire sa position qui veut que les histoires ne soient rien de plus que les fruits d’une expérience antérieure ? Il est vrai que d’un certain point de vue tout est réminiscence et que si l’on radicalise le propos il n’est d’expérience que de la répétition. L’origine devient alors un présupposé, et l’unique condition sous laquelle il devient possible d’en avoir une connaissance c’est de faire de son dévoilement un ici et maintenant. Que ce fût précisément ce qu’il advint de ce tableau dont l’histoire pourrait se résumer en une succession de recouvrements puis de dévoilements en dit long aussi sur la structure ambivalente de l’origine, mais ce n’est pas le lieu ici de développer ces questions éminemment philosophiques et particulièrement abyssales. Retenons ceci que, comme le dit Batur, le corps de cette femme est livré au sommeil (« Voilà un détail qu’aucun document ne précise : elle dort ») et qu’il ne nous est pas possible de le regarder sans régresser vers ce sommeil primordial antérieur à toute nuit, sommeil d’avant le premier réveil, sommeil d’avant la naissance du monde tel qu’on le connaît, tel que le partage du jour et de la nuit nous l’a fait connaître. Il est des gens qui s’endorment au théâtre ou au cinéma, il faut imaginer Enis Batur s’endormant à la vue de L’Origine du monde, et peut-être toucherons-nous là à l’un des nombreux secrets ou silences que son œuvre recèle dans ses multiples plis.

             Avoir touché à l’origine c’est avoir touché au but comme au recommencement, c’est avoir refermé l’éventail aux extrémités duquel deux verbes s’évertuent à s’éviter : partir et rester. Mais voilà, notre « haricot sauteur » comme il se définit lui-même ne tient pas en place, il lui faut pratiquer D’autres chemins.
             Les formes musicales sont des sources d’inspiration pour Batur. La fugue structure Amer savoir, le canon D’autres chemins. Une pensée en appelle une autre, qui démarre sa course avant que la première ait terminé la sienne. Les chemins bifurquent, se superposent, l’image du labyrinthe, notamment de ceux que l’on trouve dans certaines églises, est explicitement convoquée. Il faut dire que ce livre, généalogique au sens où il évoque les années de formation de l’auteur et la source de sa vocation d’écrivain, est en quête de quelqu’un, un certain Claude Darreyre, professeur de son état, qui fut pour l’auteur une sorte de maître à penser, un ouvreur de portes, un découvreur de mondes. C’est vers dix-sept ans qu’après avoir été renvoyé de l’école Batur exprima sa conviction de ne plus pouvoir rentrer à la maison. Un certain nombre de photographies de maisons figurent dans ce livre. Comme si cheminer, écrire, était une façon de vivre positivement l’impossibilité de rentrer à la maison, ou bien un moyen de visiter les maisons des autres, ou bien encore, c’est un topos, une manière de se faire une cabane, de s’ériger un toit. Batur n’est pas croyant, mais étant donné que son maître à penser était un « frère », il ne peut s’empêcher de voir dans l’attachement qu’il lui porta la source de son intérêt pour la vie monastique, et peut-être aussi pour l’art, étant donné que pour une grande part l’art occidental est tapissé de religiosité, des rituels aux méditations en passant par les extases ou les passions. « J’ai toujours vu, considéré que le poète, l’homme de lettres ne se confondait pas avec son statut social : en se bagarrant avec les lettres, on est, dans une certaine mesure, un proche parent des moines. » De toute évidence il y a un savant, un chercheur, chez Batur, un être tourné vers la connaissance. Peut-être y a-t-il de surcroît un ascète, c’est plus difficile à dire. L’écriture n’a certes pas comme vocation première d’aider à maîtriser ses passions, mais peut-être y contribue-t-elle ?
             On trouve sous la plume de Maurice Blanchot une pensée sur le labyrinthe qui postule que, contrairement à ce qu’on croit, le plus difficile n’est pas d’en sortir mais d’y entrer. Trouver son labyrinthe, là réside la difficulté. Et c’est pourquoi celui qui pousse la porte et nous invite à le suivre joue un rôle déterminant dans ce qui deviendra quête, errance, parcours, destin ou fourvoiement. Batur a une pensée qui fait pendant à celle de Blanchot, qu’il lui arrive de citer d’ailleurs. Alors qu’il évoque les mises en garde de ses amis qui lui reprochent de n’accorder de sens qu’à « la marche de l’être humain vers sa propre personne », il nous fait part de sa réponse : « Tels sont les vrais labyrinthes : on ne peut pas espérer qu’on s’en sortira de toute façon. » Ce dont il n’y a pas lieu de se lamenter, car qu’y aurait-il en dehors du labyrinthe, en dehors de la filiation de sens que chaque pas essaie de nouer ou renouer entre le passé et l’avenir, l’inconnu et le proche, le présent et la plénitude ?

             Rarement en lisant un auteur j’ai eu le sentiment qu’un livre en appelait un autre, que chacun d’entre eux - et ils sont nombreux chez Batur - répondait au précédent ou au suivant, entendu que l’on n’est pas obligé de les lire dans l’ordre de leur publication, qu’il en manquera toujours un à la liste, qu’il soit écrit ou non, traduit ou pas. Rarement j’ai éprouvé cette sensation d’être ravi par une voix, pas seulement accompagné par elle mais comme dépossédé de moi-même, nettoyé de tout ce qui me détermine et partant disposé au voyage ou à l’écoute d’un autre. Parce que sans doute aussi rarement une écriture ne présente avec une telle simplicité le tourment qui la hante et la passion de l’altérité qui l’anime. Sans omettre de faire la part belle au silence, au vide ouvrant, à l’inconnu.
             Après avoir roulé devant sa voiture pendant un certain temps et avoir échangé plusieurs regards avec elle, via son rétroviseur, un automobiliste se retrouve nez à nez avec la femme qui roulait derrière lui. Il hésite à inscrire son numéro de téléphone sur une feuille et à le lui tendre à travers la vitre. Profitant d’un moment où elle est distraite, il sort de son véhicule et va placer à son insu une feuille sous un des essuie-glaces de sa voiture. Il démarre rapidement puis disparaît. Il n’y a rien d’écrit sur cette feuille mais la femme ne le sait pas. Par ailleurs, rien ne nous dit qu’elle ne va pas laisser le vent en disperser les morceaux déchirés là où bon lui semblera.

Pascal Gibourg.

17 septembre 2011
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