Vincent Tholomé | STEPPE (extrait)






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Ci-dessous un nouvel extrait(s) de STEPPE – travail en cours et en expansion permanente de Vincent Tholomé.

D’autres extraits ce travail sont disponibles ici et ici ; une contribution Instinienne et Kouropatkine de Vincent Tholomé est àlire ici


STEPPE (extrait)

où l’on retrouve les garçonnes et les chiens de l’armée Kouropatkine, où l’on retrouve nos chers amis en fâcheuse posture, où le lecteur comprend soudain le fin fond de l’affaire

àChristophe Manon, doublement

nous ; petites voix ; petites voix de types et de nanas ; petites voix minuscules de types et de nanas ; petites voix minuscules émergeant du noir, voix de types et de nanas ; flots fluets de petites voix minuscules émergeant du noir et dans le noir, voix cassées de types et de nanas ; flots fluets de petites voix s’écoulant, minuscules, émergeant des bondes noires et des tuyaux, et dans le noir, s’étalant, voix cassées de types et de nanas murmurantes ; flots fluets et minuscules de petites voix presqu’éteintes mais s’écoulant pourtant, minuscules, émergeant, noires, des bondes noires et des tuyaux, et s’étirant toute la nuit dans le noir, s’étalant d’un bout àl’autre, voix cassées, éclatantes lumières, de types et de nanas murmurantes, résistantes ; flots fluets et minuscules mais si solides de petites voix fortes presqu’éteintes mais s’écoulant pourtant en continu, minuscules, émergeant, noires, des bondes noires et des tuyaux des lavabos, voix s’étirant toute la nuit dans le noir, s’étalant ci-devant hors des bondes d’un bout àl’autre, voix cassées, mais éclatantes de lumières et de rires, de types et de nanas murmurantes, résistantes, dès que le noir ; nous, flots fluets et minuscules, microscopiques mais solides voix, soudainement fortes, bien qu’éteintes ou presqu’éteintes, nous écoulant pourtant en continu, l’une sur l’autre, minuscules graines explosives, émergeant, noires, des bondes noires et des tuyaux des lavabos, de toute la plomberie des baraquements sombres, voix nous étirant, étirant les choses en longueur, toute la nuit durant, dans le noir, nous étalant ci-devant hors des bondes d’un bord àl’autre, voix cassées faisant naître, éclatantes de lumières et de rires, voix de types et de nanas murmurantes, résistantes, dès que le noir se ferait ; nous, rien que nous entre nous, vagues flots fluets et flous, minuscules, microscopiques mais solides et sà»res, voix, soudainement, fortes, assurées bien qu’éteintes ou presqu’éteintes, si proche de l’extinction, nous écoulant pépères pourtant en continu, l’une sur l’autre, l’une après l’autre, l’une contre l’autre, minuscules graines explosives, explosant soudainement la nuit, POPS, au milieu de nulle part, émergeant, noires et chargées, nous extirpant hors des bondes et des tuyaux des lavabos, glissant, nous autres, sur la porcelaine, sortant de la plomberie, toute la plomberie, le réseau fin des tuyaux des baraquements, tôles ondulées s’agitant dans le vent, voix soudainement avivées, nous étirant, prenant la place, étirant les choses, toutes les affaires, en longueur, toute la nuit durant, jusqu’au petit matin, nous perdant dans le noir, nous étalant ci-devant, surgissant hors des bondes, d’un bord àl’autre de la nuit, voix cassées, parlant en code, faisant naître et renaître la steppe, éclatantes voix de lumières et de rires, voix de sales types et de nanas sauvages et murmurantes, résistant àl’inertie, l’envie de se taire, poursuivant les choses, les inventant, dès que le noir, dans nos cellules, se ferait, dès que quelqu’un, quelque part, tournerait le commutateur ; nous, rien que nous entre nous et pour nous, nous répandant en vagues, en flots fluets et flous de petits mots minuscules, microscopiques, àpeine audibles mais si solides et sà»res, voix, soudainement, nous venant d’ailleurs, s’imposant fortes, assurées d’avoir àdire tout ce qu’elles auraient àdire, bien qu’éteintes ou presqu’éteintes, dirait une oreille distraite, si proche de l’extinction c’est possible, mais nous écoulant pépères, sans y penser, en flux et flots continus, l’une sur l’autre, l’une après, l’une contre l’autre, ajoutant, précisant, un détail, quelque chose d’oublié, minuscules graines explosives, libérant dans les airs des affaires, explosant soudainement dans la nuit des cellules, POPS, au milieu de nulle part, émergeant, noires et chargées, nous extirpant hors des bondes, des étroits tuyaux des lavabos centenaires, et bien sà»r ébréchés, glissant, nous autres, sans efforts, sur la porcelaine, prenant de l’élan, nous élançant dans le vide, sortant de la plomberie sale, étourdissant les araignées, toute la plomberie, le réseau fin et complexe des tuyaux des baraquements, tôles ondulées, et bien sà»r d’un autre âge, s’agitant dans le vent, nos voix soudainement avivées, inarrêtables, inaltérables, comme nous nous étirerions, prenant toute la place, les deux ou trois mètres carrés, étirant volontairement les choses, toutes les affaires, les traînant en longueur, pour qu’elles durent toute la nuit, ne s’épuisent pas au petit matin, nous perdant, nous autres, volontairement, dans le noir, le labyrinthe, les circonvolutions labyrinthiques, ouvrant des parenthèses, nous étalant ci-devant devant les autres, les autres chiens, les autres nanas, restes de l’armée Kouropatkine, surgissant hors des bondes plastique, dévissées, démontées, parcourant toutes les nuits la nuit, d’un bord àl’autre, voix cassées, éclatées, éclatant volontairement les choses, ne livrant jamais de version définitive, parlant en code, en sous-entendus, faisant naître et renaître la steppe, les cavalcades des boeufs musquées, les échappées folles dans les ruelles sombres des villes, les dérapages contrôlés dans les herbes sauvages, les graminées, éclatantes voix lumineuses, éclatant de lumières et de rires, voix de sales types pourtant et nanas monstrueuses et sauvages, murmurant, résistant au noir, àcette envie de se taire, reprenant les choses, poursuivant làoù nous nous serions arrêtés, ou inventant, dès que le noir, l’obscurité totale, se répandrait dans nos cellules, dès que quelqu’un, quelque part, un gardien, tournerait le commutateur, éteindrait les ampoules, les maigres lumières de vingt-cinq watts, nous plongeant pour des heures dans le noir, tout nous revenant, alors, toutes les affaires, toutes les choses, ayant un jour lieu dans la steppe, la taïga froide de Sibérie ; nous, ne parlant qu’entre nous, nous fichant pas mal des oreilles ennemies, racontant quelquefois n’importe quoi, brouillant les pistes, ne parlant que pour nous, en somme, ne pas mourir, ne pas sombrer cette nuit, ne pas laisser les spectres nous rattraper, les revenants, les revenus du passé, revenant dès que noir, que quelqu’un, quelque part, un gardien, éteindrait la lumière, minuscule ampoule, vingt-cinq watts, revenants revenant surgissant, dès que noir, nous sucer les pieds, se rappeler ànotre souvenir, nous, répandus maintenant ci-devant, en petites voix discrètes, allant venant en vagues fluides, en flots fluets, volontairement flous, cachant des choses, nous autres, parlant en code, en petits mots minuscules, l’air de rien, balancés dans les airs, n’abordant que des choses microscopiques, insignifiantes, voix àpeine voix, àpeine audibles, grattant le noir, s’élançant dans les airs, explosant soudainement dans la nuit, l’une sur l’autre, l’une après l’autre, nous extirpant hors des bondes, étourdissantes araignées, inarrêtables, inaltérables, nous cognant aux murs, aux tôles ondulées des cellules, ondulantes voix, tissant dans la nuit un grand dire, un réseau fin et complexe d’affaires, nous vivifiant, nous autres, les survivants, les restes de l’armée Kouropatkine, les chiens et nanas sauvages, nous perdant volontairement dans les choses, jusqu’au petit matin, jusqu’àce que quelqu’un, quelque part, un gardien, tourne le commutateur, allume l’ampoule dérisoire, vingt-cinq watts, ramène le jour et la chicorée, le petit déjeuner des familles, dirait-il, et, désolé les gars, désolé les filles, mais aujourd’hui pas de croissants, dirait-il, et, oui oui on comprend, dirions-nous, nous autres, petites voix presqu’éteintes, nous écoulant pépères, sans y penser, minuscules graines, explosives, éclatant dans les airs, POPS, nous répandant ailleurs, nous évadant toutes les nuits dans la steppe, la vaste prairie de Sibérie, ouvrant sans cesse des parenthèses, nous autres, chiens et garçonnes, cavalcadant àdos de boeufs musqués, chevauchant des saumons, remontant des rivières, nous lavant toutes les nuits dans les meilleures salles de bains, une mousse légère s’étirant sur nos cuisses, sur nos bras et nos cuisses, nous enveloppant d’une douceur àpeine audible, inaltérable, dirions-nous, toutes les nuits, secrètement, entre nous

Vincent Tholomé

7 juillet 2010
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