Jean-Gabriel Cosculluela / Buée, ode pour Thierry Metz
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A terre
le passeur s’esseule
en creusant les mots
dans la dernière compagnie
de ses mains
à la source de la prière

les morts donnent aux morts
l’absence vive des mots

Dans ses mains, il y a un creux
la disparition du paysage
à terre la trace nue de la mort
la buée des mots contre le froid
la voix basse de la buée
le feu

Buée
où le passeur s’esseule
vers le mot terre



Je regarde ses mains
épelant les lettres de terre
dans sa fatigue
dans son silence

Vers le mot terre
peu de mots restent
creuser les mots
froid, soif, feu
sol
d’un silence
près des mains

Du passeur
reste l’écriture penchée du corps
qui affouille le silence

Dehors commence
sur un tas de silence


Où le passeur n’a plus de nom
il y a ses mains
tombées dans le silence
pour garder encore un mot

Le dernier mot la terre
à nu dans la poignée de mains

Creuser l’adieu
noir de gorge
terreux
pierreux
froid contre feu
le silence piétine
dans l’adieu


Son ombre déjà porte en elle
la terre
ses mains d’adieu
creusent le deuil

Le mot terre vient en silence
pour tous les mots
dans la fatigue
et la disparition
et les linges du silence
habillent le mort

Buée
les mains
vers

Plus de lumière
nomme la terre nomme
chaque lettre enterrée
du mot terre
ce mot perdu
durant des jours
qui se fait jour
dans le tain fragile
de la buée


Plus bas que terre
le mot mort.
Et le mot terre
s’incline toujours
vers le mot mort.


Écrire avec la lumière.
Dans la buée
reste l’invisible
pour ouvrir


Séparés du silence,
les yeux ne savent pas
où est le moindre mot.

Extraits de " Buée ". Copyright Jean Gabriel Cosculluela
A paraître aux éditions Jacques Brémond avec des dessins de Joël Frémiot.