remue.net, le bulletin asso

Ce bulletin en direction des membres de l'association remue.net est repris ici dans le site en raison de la richesse de ses liens qui peuvnt intéresser tous les visiteurs de remue.net. Bulletin "associatif" donc, transmis le dimanche 15 août 2004

 

Si le sourire de Reims n’est pas celui de l’autorité, c’est que l’ange est dans la ville, comme perdu et pourtant le seul visible. Il n’est pas la pierre qui avec d’autres pierres porte l’ensemble de cette famille serrée sur elle-même, énorme, diverse et étroite, où chacun garde un nom et qui a couronné de ces noms tant de postérité. Ce qu’il est, c’est écrasé. Pourtant, il n’est pas écrasé par cet édifice-là, par cet événement, par ce pouvoir-là, il est écrasé de toujours pour toujours.

 

Être sans pouvoir, c’est son essence: son sourire ne peut être celui du règne. Être de toujours, mais surtout devoir être toujours, et ce sourire ne peut être celui de l’ironie.

 

La légère inclination de la tête, où sont la connaissance et l’obéissance: l’habitude. Le commandement auquel il obéit, c’est le regard, n’importe quel regard, sur n’importe quoi. De l’homme à l’herbe, de l’homme à l’homme, de l’homme à l’absent, ce qui est là, c’est sa figure. Étouffée ou radieuse, elle est là, obligée. Parole, image, musique, tout le dit et rien. Il est au cœur du domaine où toute relation va naître. Éternellement recommencée. Ne possédant rien, ne pouvant rien, il est obligé d’être là toujours. Et s’il arrive que l’on dise : “ la seule transcendance c’est la relation entre les êtres ”, dans le bonheur et dans les larmes, c’est lui que l’on voit. Otage régulier de cette prodigieuse bastille, ni maître ni frère, il est dans ce qui se passe, ce qui ne peut pas ne pas être reconnu.

L'ange de Reims (extrait) ; Robert Antelme, Textes inédits, Gallimard 1996

(Première parution: revue Lignes, 1994), cité dans Reconnaissances, Christophe Bident, Calmann-Lévy, 2003)  

 

 

Claude Vigée, poésie et judéité

 

Claude Vigée était l’invité de Victor Malka ce 15 août 2004 à l’émission « Ecoute Israël » consacrée à des poètes juifs.

 

Claude Vigée déclarait d’emblée :

 

Jacob et poésie ont le même destin

Etre juif et poète c’est tout un.

 

Puisque l’émission s’intitule Ecoute, Israël,  nous l’entendrons selon la conclusion de la conférence d’André Neher La lutte de Jacob avec l’ange (1960). Claude Vigée en a donné un commentaire détaillé dans Le Passage du vivant (Parole et silence, 2001) :

 

Et surtout, c'est une rencontre qui ne peut se faire et qui ne peut avoir une issue que si elle se fait et s'achève dans l'attente du lendemain, telle que s'achève cette rencontre de Jacob avec l'inconnu. Sous une forme émouvante, en quelques mots, la Bible ici nous montre combien a éclaté une sorte de nostalgie, nostalgie émouvante, dramatique, affective, entre les deux hommes. Ils ont lutté, et lorsque vient le moment de la séparation, chacun dit, à l'autre: « Reste encore, je voudrais que nous restions ensemble encore un instant ». Ce n'est que si de part et d'autre on est animé de cette nostalgie qu'on peut avoir conscience de la rencontre, la conscience de la bénédiction. Car la bénédiction n'est autre chose que l'attente de nouveaux combats, au lendemain, et le désir de se retrouver dans ces combats.

 

(revue Conférence N° 15, automne 2002, p.212).

 

Emission très émouvante avec l’évocation de Paul Celan (Mandorle, cf le récent livre des Poèmes traduits et présentés par John Edwin Jackson chez Corti), Nelly Sachs (Eclipse d’étoile, Verdier avec debelles recensions) et Benjamin Fondane (Société d'études Benjamin Fondane animée par Monique Jutrin, actes du colloque de Royaumont), la lecture de leurs poèmes par Claude Vigée et aussi des échanges autour de Chaim Nachmann Bialik, Yehuda Amichaï et le poète yiddish rescapé du ghetto de Vilno : Avrom Sutzkever (cf Dans la langue de personne de Rachel Ertel).

 

Nous rappellerons une belle publication universitaire sur quatre poétesses juives de langue allemande, et que Claude Vigée  a traduit récemment Shirley Kaufman aux éditions Cheyne : Un abri pour nos têtes (bilingue).

 

Et on ne saurait terminer sans inviter à une exploration du  site consacré à Claude Vigée : y écouter du judéo-alsacien, rencontrer le poète-enseignant, ses réflexions sur le judaïsme, la Shoah,  et bien sûr lire de très beaux poèmes.

 

 

L’invité mystère

 

Je n’ai pas lu Rapport sur moi de Grégoire Bouillier lors de sa parution. L’attribution du prix de Flore, ne constituant pas a priori un encouragement à le faire. Plus encore, l’écho donné par radio-arte lors de la remise de ce prix aurait achevé d’être dissuasif ! D’autre part, les bribes de récits de vie glanées dans  les recensions pointent l’autofiction mode dont nous ne sommes guère friands à remue.net.

 

A la lecture de « L’invité mystère », (éditions Allia, comme le premier, réédition en « J’ai lu »), on a envie d’y aller voir.

 

Soit cet extrait :

 

[…] je songeai alors que le véritable invité mystère n'avait nullement été moi, mais ce roman anglais écrit dans les années 1920 qui s'était introduit en douce dans son existence pour en changer le cours, et le mien par voie de conséquence, et depuis toujours n'était-ce d'ailleurs pas la littérature qui s'invitait mystérieusement dans l'histoire des hommes et l'on croit penser à tout et on oublie le livre posé sur la table de nuit.

 

Pour le reste voir l’excellente  recension d’Alain Nicolas qui conclut ainsi dans  l’Humanité

« cet auteur est un despote qui joue de la proximité qu’il sait établir avec le lecteur pour mieux l’entraîner dans un récit souriant et diaboliquement raffiné. »

 

Un vrai talent en effet ! (la sonde Ulysse, la mort de Michel Leiris, l’anniversaire de Sophie Calle, les roses de Mrs Dalloway ne sont nullement là par hasard)

 

”Off the record” , Grégoire Bouiller était l’invité (sans trop de mystère) du Journal de la semaine de Libération ; à lire pour l’expression fortement philosophique d’une petite fille.

 

Dominique Cabrera, « un film comme un roman »

 

Mona Chollet qui anime le site Périphéries et dont paraîtra un prochain livre :  La tyrannie de la réalité a accueilli sur son site la cinéaste Dominique Cabrera parmi ses « Gens de bien »

 

 

Son dernier film, Folle embellie, avec Jean-Pierre Léaud et Miou-Miou, passe actuellement dans les salles « art et essai »

Dominique Cabrera a été interviewée par arte lors de la précédente berlinale où le film avait été présenté :  un film comme un roman, nous dit-elle.

 

A Chatillon/s/Loire, on se souvient encore du tournage.

 

 

 

 

Belle fin d’été !

Août - Les étoiles filantes sont les dernières fleurs de l'été (François Cassingena-Trevedy)

 

 

 

 

Ronald Klapka,  remue.net association

 

le bulletin a été transmis le dimanche 15 août 2004 à 124 adhérents 

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